Un spectacle en hommage aux élèves de Chatou
Quelle a été la genèse de ce spectacle ?
Cela remonte à 2019, qui est l’année du centenaire de la mort d’Auguste Renoir. Pour l’occasion, j’avais composé une chanson pour les classes à horaires aménagés musique (CHAM) du collège éponyme de Chatou, "La lumière de Renoir." Dans la foulée, leur professeur de chant m’a commandé une comédie musicale.
Comment avez-vous choisi ce thème ?
Il y a eu plusieurs influences. D’abord, mon intention, qui était d’écrire des chansons positives, qui aident à se sentir mieux, d’autant que nous étions tous confinés. Ce devait être aussi un hommage à Chatou, la ville des élèves pour qui je l’écrivais. De plus, je rêvais d’écrire une chanson de marins (ce sera "Ailleurs"), ce qui m’a conduit à rechercher l’inspiration dans les romans que j’avais lus. C’est comme ça que j’ai trouvé John Silver, puis Gavroche, ou encore l’allumeur de réverbères… Ce sont des personnages marquants, un peu en marge, seuls à leur façon. C’est alors que m’est venue l’idée de les relier grâce à ce groupe d’enfants qui se trouve dans la nuit.
Variations autour de la solitude
Quand on chante ou qu’on écoute les chansons, on ressent cette solitude. Est-ce que c’est quelque chose que vous avez vécu vous-même ?
Bonne question ! (rires). Quand j’étais enfant, j’étais extrêmement timide en effet, et assez sensible, mais j’étais solitaire sans être seul, car j’avais des amis. Devenir enseignant m’a guéri de ma timidité, mais je reste très attentif aux autres et à ce qu’ils ressentent. Ainsi, c’est la vision d’un enfant qui déjeunait toujours seul à la cantine d’un collège où j’enseignais, un enfant négligé par les autres, qui m’a inspiré la chanson "Que dit l’enfant ?"
Votre profession vous a donc inspiré, mais vous n’avez pas toujours été enseignant. Quel est votre parcours ?
J’ai longtemps été parolier pour des artistes de variété. C’est un métier très créatif mais ingrat, car on doit écrire plusieurs chansons par semaine dont très peu sont retenues. Puis j’ai repris des études de lettres, sous l’influence de ma compagne, pour essayer le métier d’enseignant.
Mon premier cours, devant une classe de 6ème, a été une révélation : c’était vraiment le métier que je voulais faire, et que j’exerce depuis. J’aime toujours écrire, j’écris toujours des chansons et ça ne me dérange pas que ce ne soit plus mon métier. Prof c’est mieux !
Une chanson est un peu à part dans Les lumières de Chatou, c’est le "Chemin des Terres blanches."
C’est exact… Cette chanson est sans doute la plus complexe de toutes. Je portais depuis longtemps en moi le thème des fantômes amoureux, et comme je ne voulais pas faire chanter une chanson d’amour à la première personne à des élèves de 6ème, j’ai trouvé ce moyen d’inviter l’amour dans le spectacle.
Mais cette chanson a plusieurs sens, n’est-ce pas ?
Oui ! On peut se demander si celui qui chante est le spectateur de fantômes qui lui sont étrangers, ou si ces fantômes ne sont pas ses propres souvenirs. C’est ce que suggèrent les paroles "une saison qui n’existe plus."
Un spectacle écrit en 3 mois
Il y a une grande variété mélodique et rythmique dans les chansons du spectacle, c’est un choix ?
En effet, il s’agissait de varier au maximum, pour éviter l’ennui. J’ai toujours plus écrit des paroles que composé des mélodies, ça a été une gageure pour moi d’en composer autant dans un temps aussi court ! Le seul genre que je n’aie pas intégré, bien que je l’apprécie beaucoup, était le rap, qui ne convenait pas aux CHAM.
Vous parlez de gageure, pouvez-vous nous en dire plus sur la façon dont vous avez travaillé ?
La première chose, c’est que le temps était très contraint : il fallait compter au moins 6 mois de répétition pour les élèves, à partir de la rentrée. J’ai donc disposé d’environ 3 mois pour tout écrire, à raison de 4 à 5 heures par jour, après mes cours et la correction des copies.
Pour toutes les chansons j’ai procédé de la même façon : j’avais un thème, à partir duquel je recherchais une mélodie au piano. A partir de la mélodie, je trouvais le titre, et enfin venaient les paroles, que j’écrivais par-dessus la musique. Mais le travail n’était pas terminé : est-ce que la chanson tenait la route ? Il faut toujours se poser la question quand on écrit, et donc la réécouter à tête reposée, et la faire écouter autour de soi. Pour Les lumières de Chatou, j’ai écrit 25 chansons en tout, et n’en ai retenu que 12 à la fin.
On en a même écarté une après l’enregistrement de la maquette, car c’est au moment d’y ajouter la voix qu’on s’est rendu compte que ça n’allait pas.
A la fin, et avec le fil conducteur des personnages solitaires et des enfants perdus qui finissent par se trouver, le spectacle est très cohérent. Délivre-t-il un message ?
C’est moins un message qu’un sentiment, peut-être. Tout d’abord, pour ceux que ça concerne, que l’on n’est pas seul à être tout seul. Et puis que la musique, et l’art en général, sont des moyens d’aller mieux.
Propos recueillis par Malou, Margot et Sophie,
ambassadrices Culture et membres de la chorale.
Retrouvez quelques-unes des chansons des Lumières de Chatou
le 20 juin au collège pour la fête de la musique du collège !
La comédie musicale dans son entier est disponible sur toutes les
plateformes de streaming.